Forum sur la maltraitance envers les personnes aînées: l’Ordre se distingue (3e volet)

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N.D.L.R. : Voici le dernier volet de cette série à propos du Forum sur la maltraitance matérielle et financière envers les personnes aînées

 

Intervenir en cas de maltraitance matérielle et financière

Au chapitre de l’intervention, il a été évoqué qu’une fois le cas d’abus confirmé, il est nécessaire d’évaluer l’intention du maltraitant : intentionnel ou non intentionnel? Si l’abus est non intentionnel, l’approche sera plutôt éducative; dans l’autre cas, l’approche sera adaptée en fonction des enjeux relationnels en cause et de la nature de la protection recherchée.

Pour sa part, la présidente de l’Ordre a indiqué que pour avoir une meilleure portée, l’intervention en situation de maltraitance matérielle et financière doit être diligente, planifiée, intégrée, interdisciplinaire et intersectorielle. Elle doit également se réaliser en collaboration avec la personne et être respectueuse de ses droits, notamment de son droit au respect du secret professionnel, ainsi que de son cheminement, de ses valeurs, de son histoire psychosociale ainsi que de son droit à recevoir assistance et protection au besoin.

Pour le travailleur social, cette intervention s’actualise principalement à trois niveaux. Premièrement auprès de la personne aînée elle-même; il l’accompagne à prendre conscience de la dynamique de maltraitance, à réfléchir à ses impacts, à l’escalade possible; il la soutient et l’aide à aménager ses relations pour regagner le respect de ses proches, à affirmer ses limites, mais aussi à prendre des décisions ou à mettre en action des moyens de protection. Deuxièmement, il intervient auprès des proches et de l’entourage de la personne aînée. Que ceux-ci soient préoccupés, inquiets ou témoins de maltraitance, le travailleur social voit à les outiller et à les soutenir dans l’utilisation de stratégies appropriées. Le travailleur social pourra faire cheminer les proches, les amener à prendre position et à agir à l’égard d’une personne maltraitante. Troisièmement, le travailleur social peut agir auprès de la personne maltraitante elle-même, contribuant à nommer les faits et leur impact sur la personne maltraitée, suscitant et soutenant un changement de sa part.

L’autodétermination et le développement du pouvoir d’agir de la personne sont au cœur de l’intervention du travailleur social qui doit veiller à briser l’isolement et la solitude de l’aîné, tout en renforçant son pouvoir. La sécurité et le respect de la personne maltraitée doivent être au cœur de l’intervention.

La sécurité et le respect de la personne qui vit la maltraitance doivent être centraux dans l’intervention.

Il faut assurer un soutien psychologique et émotionnel à la personne aînée et l’accompagner tout au long du processus de dénonciation et après. L’accompagnement doit se faire tant au plan économique, que psychosocial et juridique. Il faut être prudent lors de l’intervention pour ne pas aggraver la situation, «revictimiser» la personne, briser les liens familiaux qui lui sont si chers ou l’isoler davantage. Le lien affectif qui unit les parents aux enfants est important; il faut être prudent et bien analyser la situation avant de couper un lien avec un enfant ou un aidant naturel.

Le travailleur social actualise les démarches nécessaires pour la personne et agit enfin en concertation avec les ressources du milieu et en partenariat avec les acteurs clés qui sont concernés par la situation.

L’intervention du travailleur social est donc complexe et nécessite beaucoup de doigté. La qualité de cette approche doit se fonder en tout premier lieu sur le lien de confiance et de proximité établi et maintenu avec la personne concernée, basée sur une évaluation rigoureuse et un plan d’intervention approprié. Ce lien se développe au fil du temps dans une espace de partage, de communication et de proximité. Nous croyons que des moyens appropriés seront à développer afin qu’une pleine reconnaissance de ces interventions soit bien comptabilisée dans la reddition de compte actuelle.

 

Contribuer à faire diminuer la réticence à signaler

Un des aspects importants qui est ressorti des échanges concerne la réticence d’une personne aînée qui est maltraitée au plan matériel et financier à dénoncer la situation. Pour diminuer cette réticence, tout en respectant la vie privée, la dignité et l’autodétermination de la personne aînée, plusieurs actions sont possibles et doivent être choisies selon la situation :

  • informer clairement la personne du cheminement d’un signalement et anticiper avec elle les conséquences qui peuvent survenir
  • demeurer en contact avec elle
  • réduire son isolement
  • mettre en place un filet de sécurité
  • favoriser la médiation et la conciliation du conflit à l’origine de la maltraitance
  • dénonciation, plainte
  • signaler le cas au Curateur public
  • mettre en place des mesures de protection concertée avec les autres intervenants

S’il faut au besoin mettre en place un filet de sécurité autour de la personne, il est important de le concevoir avec elle et d’assurer la réalisation des actions fondées sur ses besoins. De plus, il faut établir un plan d’intervention prévoyant le temps nécessaire pour résoudre la situation de façon adéquate, sécuritaire, fondée sur ses volontés et ses droits. Enfin, il faut éviter de renforcer le pouvoir de la personne maltraitante en mettant en place une intervention qui n’aboutit pas et qui place la personne dans une situation encore plus vulnérable, une fois que les professionnels ne sont plus présents.

 

Quoi faire en cas de refus de la personne aînée maltraitée?

En cas de refus de la personne maltraitée à dénoncer une situation, il faut évaluer si elle est apte ou non et, sur la base d’une évaluation rigoureuse, considérer ensuite ce qu’il convient de faire dans cette situation. Il y a lieu d’être perspicace, de rester en contact et de maintenir une surveillance, de réduire l’isolement de la personne et de continuer de tisser le lien de confiance et, lorsque c’est possible, aider la personne à trouver des solutions.

 

Ententes socio-judiciaires

À la suite d’un projet pilote mené chez les policiers de Trois-Rivières, le gouvernement a décidé de déployer cette initiative sur l’ensemble du territoire. Uniquement dans les cas potentiellement criminels ou pénaux, un processus en cinq étapes s’applique. Celui-ci facilite la gestion des dossiers et permet à tous les acteurs de se concerter.

 

Que devons-nous faire à titre de professionnel et travailleur social?

Il est de toute première importance de prendre position contre la maltraitance et pour la bientraitance. L’OTSTCFQ multipliera ses actions dans ce dossier et veillera notamment à mieux soutenir la pratique des travailleurs sociaux en regard de ce phénomène en croissance. En ce sens, la participation de l’Ordre au comité consultatif du ministère de la Famille et des aînés sera maintenue. D’autre part, l’Ordre travaillera en collaboration avec trois autres ordres professionnels pour offrir à ses membres de la formation et des guides et s’assurer que le travailleur social développe constamment son expertise en la matière, une expertise unique et reconnue par tous : le travailleur social est un professionnel incontournable en matière de maltraitance des personnes aînées.