Penser ou panser le travail social au Québec?

Par Marie-Lyne Roc, T.S., M.Sc., chargée d’affaires professionnelles à l’OTSTCFQ | Publié le 3 mai 2018

À la lecture du dossier précédent, il est impressionnant de constater à quel point le Québec partage des réalités communes avec une majorité de pays occidentaux.

Comme c’est le cas ailleurs, le travail social a largement contribué à faire du Québec une société plus égalitaire, plus inclusive, plus juste. En matière de protection, de défense et de promotion des droits des personnes, les accomplissements du travail social sont nombreux et impressionnants. Les avancées dans les domaines tels que la protection de la jeunesse, la protection des personnes majeures inaptes, l’itinérance, la dépendance, la violence, l’immigration, la santé mentale, les soins en fin de vie démontrent certainement le chemin parcouru.

Pourtant, le travail social au Québec est plus que jamais mis à l’épreuve. Tout comme ailleurs, les orientations sociopolitiques et économiques de l’État, fondées sur la mondialisation et le néo-libéralisme, frappent de plein fouet la pratique du travail social. Il y a à cet égard unanimité : faire du travail social aujourd’hui, au Québec, représente un défi de taille. Pour les acteurs du social, rester intègres, fidèles et collés sur les fondements, les valeurs et les principes du travail social demande de penser, d’être et d’agir constamment à «contre-courant», de faire «bande à part».

À la croisée des chemins

Le travail social au Québec est à la croisée des chemins et doit se positionner autrement puisque les méthodes traditionnelles n’arrivent plus à atténuer les effets de la mondialisation. Serait-ce le moment d’établir un travail social plus politisé, plus critique et même plus radical? Est-ce que le travail social aurait avantage à sortir du système?

Considérant l’état du Québec, aujourd’hui, il y a fort à parier que les enjeux des prochaines années seront liés aux besoins et défis que posent le vieillissement de la population, aux réalités associées à la diversité sur tous les plans, aux transformations des institutions publiques en raison de la privatisation et de la philanthropie, à la redéfinition des rôles sociaux et aux transformations des rapports sociaux. Les questions entourant les besoins et les réalités des communautés autochtones, la revitalisation des régions rurales, la protection de l’environnement, l’utilisation des nouvelles technologies de l’information, des médias et de l’intelligence artificielle sont autant de domaines qui toucheront le travail social comme discipline et comme pratique professionnelle. Enfin, malheureusement, tout porte à croire que la pauvreté, les inégalités sociales, la discrimination, l’exclusion sociale demeureront encore présentes au Québec.

Pour une solidarité autour du travail social

En réponse à la complexité de ces réalités sociales, tous les acteurs du travail social doivent unir leurs forces. Praticiens, chercheurs, gestionnaires, enseignants, étudiants, citoyens et même les ordres professionnels sont appelés à travailler ensemble, en collaboration et en complémentarité, pour contrer la mouvance dominante. La littérature ainsi que les données empiriques relèvent les possibilités et les avantages de nouvelles alliances à établir, notamment entre le travail social et l’écologie, entre le travail social et la santé publique ou encore entre le travail social et la sécurité publique. D’autres misent sur des pratiques créatives, novatrices, collectives, anti-oppressives, de proximité, axées sur l’empathie et l’éthique sociales. Ces pratiques se développent, ici comme ailleurs, comme antidotes aux difficultés rencontrées par les victimes du contexte actuel.

En somme, ce dossier reflète la pluralité et la complexité des enjeux sociaux auxquels fait face le travail social d’ici. Nous souhaitons qu’il fasse valoir et connaître certaines pratiques et prises de position inspirantes. C’est une façon d’unir nos forces, nos idées et nos façons de faire pour qu’émerge un travail social respectueux de ses fondements, de ses valeurs et principes de justice sociale et de respect des droits humains.

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