Accès à l’espace social genré

Les espaces sociaux genrés incluent des lieux publics ségrégés en fonction du genre, comme les toilettes, les vestiaires, les refuges, les centres d’hébergement en centres jeunesse et les centres de détention.

Au Québec, une autre composante fondamentale du vivre-ensemble opère en fonction du genre : la langue française. En effet, la communication est essentielle à la participation à la société. Les personnes trans se voient souvent exclues de ces espaces genrés, intentionnellement ou non, ce qui nuit à leur intégration à la collectivité.

Toilettes

Parmi 27 715 personnes trans américaines, au cours de l’année précédant la collecte de données :

  • Une sur quatre (24 %) a fait l’objet d’une remise en cause de par sa présence dans une toilette publique;
  • Une sur dix (9 %) s’est vue nier l’accès à une toilette publique;
  • Une sur huit (12 %) a été harcelée verbalement, agressée physiquement ou sexuellement, dans une toilette;
  • Plus de la moitié (59 %) ont renoncé à utiliser une toilette, pour éviter des problèmes;
  • Une sur trois (32 %) a limité sa consommation de liquide ou de nourriture pour éviter les toilettes;
  • Par conséquent, 8 % ont eu une infection urinaire, une infection des reins ou un autre problème rénal. Source : James et al. (2016)

Les difficultés d’accès aux toilettes et autres lieux genrés nuisent à l’éducation, à l’emploi, à la santé et à la participation à la vie collective des personnes trans (Herman, 2013).

Langue française

La langue française est construite autour de deux genres grammaticaux: le féminin et le masculin. En Français, tout a un genre, même les objets. Pour les personnes trans, il s’agit d’une importante barrière au vivre-ensemble, puisqu’elles risquent d’être systématiquement mégenrées, c’est-à-dire que l’on réfère à elles en utilisant le mauvais genre grammatical.

Une personne trans peut être mégenrée :

  • Par des étrangers ou des personnes de son entourage qui ne sont pas au fait de son statut trans et qui présument connaître son genre;
  • Par des personnes connaissant ses pronoms et le genre linguistique lui convenant, mais qui se trompent;
  • Par des personnes refusant d’utiliser les bons pronoms et le bon genre linguistique.

Certaines personnes non binaires ne se reconnaissent pas dans les deux genres linguistiques privilégiés en français, optant plutôt pour des accords neutres et des pronoms plus neutres ayant récemment émergé dans la langue française, comme « iel » ou « ille ». Ces personnes font face à une barrière sociolinguistique supplémentaire, puisque le français non genré demeure largement méconnu : en plus d’avoir à sortir du placard, les personnes non binaires doivent systématiquement éduquer les gens avec qui elles interagissent, afin de pouvoir être respecté dans leur identité de genre.

Être mégenré, c’est lourd de conséquences

Le mégenrage est associé à davantage d’affects négatifs, un plus faible sentiment d’authenticité, une moins grande estime de soi, par rapport à son apparence, une moins grande force et cohérence identitaires, ainsi qu’un sentiment accru de stigmatisation. Ces impacts du mégenrage sur la santé mentale nuisent à la pleine participation des personnes trans à la société (McLemore, 2015).

Citations

« En tant qu’étudiant trans, je trouve ma relation avec les institutions parfois étrange. Les infrastructures ne sont pas adaptées… Beaucoup de bâtiments n’ont pas de salles de bains neutres. Et moi et mes amis, nous ne nous sentons pas toujours en sécurité lorsqu’on utilise des salles de bains genrées parce qu’on vous pose des questions, et il y a des gens qui se font agresser dans ces salles de bain. »

– Jo, 21 ans, agenre.

« Je suis allé en centre [jeunesse], ça fait au-dessus de deux ans et demi à peu près. Pis çà été quand même assez rough. J’étais en centre du côté des femmes, pis en tout cas, pour vrai là, tu ne veux pas te ramasser là quand tu es… Quand tu sors de la norme, tu ne veux pas être là-bas. Tu sais, tout, tout, tout au complet était genré. »

– Nicolas, 20 ans, masculin mais fluide.

 

LumièrePistes d’intervention

Pour les toilettes et autres lieux

  • Aider la personne à repérer des lieux non genrés, par exemple à son école.
  • Se mobiliser afin que les endroits régulièrement fréquentés par les jeunes trans offrent des lieux neutres dans le genre, par exemple en convertissant les toilettes uniques en toilettes neutres.
  • Inciter les endroits régulièrement fréquentés par les jeunes trans à laisser le choix aux jeunes, pour l’espace genré qui leur convient le mieux.
  • S’assurer que les espaces de travail et d’intervention adoptent des politiques inclusives en ce qui concerne l’accès aux toilettes, et qu’il y ait au moins une toilette non genrée.

Pour la langue

  • Apprendre à s’exprimer sans genrer.
    • Grammaire Rebelle, disponible à l’Euguélionne, Racines, GRIP Concordia et au Centre de lutte contre l’oppression des genres.
  • S’efforcer de ne pas genrer les personnes que l’on ne connaît pas; utiliser des tournures de phrase neutres : « La personne m’a dit que… »
  • S’informer : « Je m’appelle Julie et j’utilise le pronom elle, toi? »
  • Une fois informé, toujours utiliser le bon langage pour référer à une personne trans.
    • Se pratiquer en l’absence de cette personne.

L’erreur est humaine!  En cas d’erreur, se reprendre, s’excuser brièvement et continuer : « Tu es bon, euh… excuse-moi; bonne… »

 

Références

  • Herman, J. L. (2013). Gendered restrooms and minority stress: The public regulation of gender and its impact on transgender people’s lives. Journal of Public Management and Social Policy, 19, 65 – 80
  • James, S. E., Herman, J. L., Rankin, S., Keisling, M., Mottet, L., & Anafi, M. (2016). The Report of the 2015 U.S. Transgender Survey. Washington, DC: National Center for Transgender Equality.
  • McLemore, K. A. (2015). Experiences with Misgendering: Identity Misclassification of Transgender Spectrum Individuals. Self and Identity, 14(1), 51‑74. https://doi.org/10.1080/15298868.2014.950691

 

Voir aussi :

 

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