Sous-traitance ou courtage de services : des pratiques qui soulèvent des questions

Par | Publié le | dans la catégorie Chroniques du syndic

Depuis quelques années, nous observons un attrait marqué pour la pratique autonome chez nos membres, particulièrement concernant l’évaluation psychosociale dans le contexte de l’ouverture d’un régime de protection ou de l’homologation d’un mandat de protection. Par contre, certaines pratiques soulèvent des questionnements et méritent qu’on s’y attarde.

La pratique généralement répandue

De façon générale, le professionnel exerçant en pratique autonome dans ce champ d’intervention reçoit les références des clients directement ou par l’intermédiaire d’un notaire. Il rencontre les personnes faisant la demande et conclut avec elles une entente de services. Une fois l’évaluation réalisée, un état de compte est envoyé et le professionnel reçoit les honoraires correspondant au travail effectué, en concordance avec la structure tarifaire proposée à la page 40 du Guide de pratique, soit entre 80 et 110$ l’heure ou entre 650$ et 1 100$ pour un montant forfaitaire.

Une nouvelle façon de faire

Depuis quelques mois, nous observons le développement de services de courtage ou de sous-traitance. Une personne, membre ou non de notre ordre, fait la promotion des services d’évaluation psychosociale pour l’homologation des mandats de protection et des régimes de protection. Elle reçoit des demandes du public et les réfère à des travailleurs sociaux pour procéder à l’évaluation, moyennant un partage des honoraires.

Avant de poursuivre, nous vous rappelons que dans sa mission de protection du public, le Bureau du syndic n’a de pouvoir d’enquête que sur les membres de l’Ordre. Cet article traitera ainsi des situations où l’intermédiaire n’est pas membre de notre ordre puisque s’il est membre, nous pourrons faire enquête sur la situation et prendre des décisions en conséquence.

La pratique de sous-traitance soulève des questions. Certains modèles d’affaires comportant des ressemblances pourraient être parfaitement conformes à notre code de déontologie. Aussi, sans vouloir nous immiscer dans les modèles d’organisation des services de non membres en pratique autonome, nous croyons pertinent de vous rappeler certaines obligations déontologiques et professionnelles, ainsi que vous informer des nouvelles pratiques en évolution. Voici donc quelques informations vous permettant de prendre des décisions éclairées dans le choix et le déroulement de votre pratique autonome.

Quelques balises

En premier lieu, l’article 3.05.05 se lit comme suit : « Le cas échéant, un travailleur social partage ses honoraires avec une autre personne dans la mesure où ce partage correspond à une répartition des services et des responsabilités ». Le partage de responsabilité est une notion très importante dans cet article puisqu’il réfère au partage des actes professionnels posés pour les clients. Ainsi, avant d’accepter des honoraires d’une tierce personne vous référant des clients, vous devez vous questionner sur la correspondance entre les honoraires et le partage des responsabilités et des services offerts.

Ensuite, l’article 3.05.07 stipule que : « Pour un service donné, le cas échéant, le travailleur social accepte des honoraires d’une seule source, sauf entente entre toutes les parties intéressées. Il n’accepte le versement de ces honoraires que de son client ou de son représentant ». Faisant suite à l’article précédent, les honoraires sont, sauf exception, versés seulement par le client ou son représentant.

Suivant l’article 3.06.04, le travailleur social « veille à ce que les personnes qui travaillent avec lui ne communiquent pas entre elles ou à des tiers des informations de nature confidentielle ». L’intermédiaire qui fournit un dossier en sous-traitance à un travailleur social a-t-il été sensibilisé à l’importance de la confidentialité? D’autres questions surgissent également si l’intermédiaire archive dans ses propres filières une copie du rapport d’évaluation, même s’il est obtenu avec le consentement du client. En effet, si l’intermédiaire est assigné dans un litige judiciarisé pour déposer sa copie, il ne pourrait invoquer le secret professionnel brimant ainsi le client certains des mécanismes de protection habituels.

Quant à l’article, 4.02.04, il énonce que  « Le travailleur social engagé dans une pratique professionnelle conjointement avec d’autres travailleurs sociaux ou avec d’autres personnes voit à ce que cette pratique ne cause aucun préjudice aux clients ». Il serait prudent de demander à voir les ententes de services conclues entre l’intermédiaire et les clients, autrement, comment savoir si cet article est respecté?

Finalement, le Guide de pratique prévoit une structure tarifaire entre 80 et 110$ l’heure ou entre 650$ et 1 100$ pour un montant forfaitaire. Cette structure est reconnue dans la pratique comme des honoraires justes et raisonnables en concordance aux articles 3.08.01 et 3.08.02 du Code de déontologie.

La protection du public : une responsabilité partagée

L’évaluation psychosociale dans le contexte de l’ouverture d’un régime de protection ou de l’homologation d’un mandat de protection est une activité réservée compte tenu du risque de préjudice pour la clientèle. Nous sommes fiers que notre expertise à ce niveau soit reconnue. Cela implique que chaque membre mène des interventions de qualité, à la hauteur des compétences qui nous sont reconnues, contribuant ainsi à la protection du public.