Travailleuse sociale humanitaire en soutien psychosocial pour la Croix-Rouge canadienne en Haïti, Emilie Gauthier-Paré est membre de l’équipe de la clinique mobile qui se déplaçait quotidiennement dans les villages reculés du département de Grande Anse dans le sud-ouest du pays ravagé par l’ouragan Matthew.
Sur place, la clinique de la Croix-Rouge canadienne offrait – et ce jusqu’à tout récemment – des soins primaires et sensibilisait la population aux risques de choléra.
Le rôle d’Emilie était d’apporter un soutien en premiers secours psychologiques.
Une tâche rendue particulièrement ardue par l’ampleur du désastre
Le puissant ouragan Matthew a touché une grande partie de la population et causé des dommages importants aux foyers, aux récoltes, aux bâtiments et à l’infrastructure. Lorsque le tissu de la société est touché à ce point, tous en souffrent, comme si chacun devenait une victime et que même les plus résilients ont peine à venir en aide aux plus démunis.
«Chaque jour, je vois des enfants qui présentent des séquelles sévères liées à la perte de leur maison ou d’êtres chers»
L’intervention de la spécialiste en soutien psychosocial est essentielle
«Plusieurs enfants arrivent à la clinique avec l’estomac vide, ce qui ajoute à leur stress», raconte Emilie. Observer, écouter et mettre en contact sont les trois grands principes qui guident son action. Elle doit identifier rapidement les services disponibles au sein de la communauté : église, voisins, famille, amis, bénévoles de la Croix-Rouge haïtienne. Elle oriente ensuite les personnes qui requièrent un soutien spécialisé vers ces services ou, dans les cas plus graves, vers des professionnels en santé mentale.
«Mon plus grand défi est de composer avec les ressources que je trouve sur place», souligne Emilie. Au village de Moline, dans la commune de Pestel, elle a identifié une personne qui a été d’un énorme secours : le prêtre du village. «Lors de notre arrivée, le prêtre nous a chaleureusement accueillis. J’ai ensuite pu lui confier une famille qui n’avait pas mangé depuis plusieurs jours».
La jeune Medjinn
Du haut de ses huit ans, un œil infecté, Medjinn Precilien arrive seule à la clinique que l’équipe vient d’installer à Anse d’Hainault. Elle habite à Morne-Dema, à plus d’une demi-heure de marche. Medjinn, sa mère, son beau-père, ses quatre sœurs et ses deux frères ont tout perdu. Grâce à une distribution de matériel de secours, ils ont reconstruit un logis pour se mettre à l’abri du vent et de la pluie.
Medjinn était à la maison lorsque l’ouragan a frappé. Elle n’oubliera jamais ce cauchemar.
Comme toutes les jeunes filles de son âge, elle aimait bien jouer avec sa poupée. Sa poupée s’est envolée avec tout ce que sa famille possédait. Aujourd’hui, elle rêve de devenir médecin pour aider les gens qui ont besoin de soins.
Reprendre une vie normale
Au premier contact avec une personne, Emilie peut déceler les indices d’un état de choc: par exemple, le manque d’appétit ou encore, chez les enfants, la perte d’intérêt pour le jeu. «Il est important d’encourager les enfants à jouer, ce qui, à leur âge, représente le comportement normal. Mon défi est de développer des outils sur le terrain.
Des ballons, des crayons, du papier, de la peinture, en fait, tout ce que je peux trouver sur place. Il n’est pas nécessaire que ce soit sophistiqué; il suffit de permettre à l’enfant de commencer à reprendre un tant soit peu une vie normale».
NDLR : Emilie Gauthier-Paré exerce les fonctions de travailleuse sociale à l’Hôpital Santa Cabrini.
Elle agit également en tant qu’intervenante en soutien psychosocial auprès de la Croix-Rouge canadienne. Lors de sa première mission internationale avec la Croix-Rouge, elle fut déployée à Kenema, en Sierra Leone, pendant l’épidémie d’Ebola, en 2014.
Elle a également passé un mois dans un camp de réfugiés en Grèce à l’automne 2015. À titre d’intervenante en soutien psychosocial, Emilie veille à ce que les besoins des bénéficiaires soient comblés, en plus d’offrir de la formation et du soutien aux bénévoles locaux.
Parmi ses autres expériences à l’étranger, notons son travail à titre d’éducatrice en prévention de la violence familiale à Accra, au Ghana, et un stage de 18 semaines axé sur les enfants en danger au Burkina Faso, dans le cadre du Programme de coopération volontaire.