Depuis le dépôt du projet de loi 67 (PL-67), Loi modifiant le Code des professions pour la modernisation du système professionnel et visant l’élargissement de certaines pratiques professionnelles dans le domaine de la santé et des services sociaux, l’Ordre reçoit plusieurs questions et commentaires. Nous vous proposons donc ci-dessous quelques précisions et un retour sur les démarches de l’Ordre dans le dossier du diagnostic.
Précisions sur le diagnostic des troubles mentaux
Ce qu’il faut retenir du PL-67, c’est qu’il ne vise pas à élargir la réserve d’activités de nature diagnostique à de nouveaux ou nouvelles professionnel·les. Il vise plutôt à remplacer le terme « évaluer » par « diagnostiquer » dans la loi.
Autrement dit, les professionnel·les qui auront le droit d’utiliser le mot « diagnostic » en santé mentale sont ceux qui sont déjà habilité·es à exercer des activités de nature diagnostique depuis l’entrée en vigueur du projet de loi 21, ce qui n’est pas le cas des T.S. et T.C.F. En effet, les membres de l’Ordre peuvent exercer l’activité réservée suivante : « évaluer une personne atteinte d’un trouble mental ou neuropsychologique attesté par un diagnostic ou par une évaluation effectuée par un professionnel habilité », mais pas celle « d’évaluer les troubles mentaux ».
L’évaluation d’un trouble mental, dans le contexte de la réserve d’activités, consiste à porter un jugement clinique, à partir des informations dont le ou la professionnel·le dispose, sur la nature des « affections cliniquement significatives qui se caractérisent par le changement du mode de pensée, de l’humeur (affects), du comportement associé à une détresse psychique ou à une altération des fonctions mentales et à en communiquer les conclusions. » Cette évaluation s’effectue selon l’une des classifications reconnues des troubles mentaux les plus utilisées en Amérique du Nord.
Advenant l’adoption du PL-67, les psychologues pourront diagnostiquer les troubles mentaux, et une portion d’entre eux et elles détenant une attestation de formation de l’Ordre des psychologues du Québec pourront diagnostiquer les troubles neuropsychologiques.
Dans un même ordre d’idée, sous réserve de suivre un corpus théorique et pratique de formation prévu par règlement et de détenir une attestation de formation, les autres professionnel·les déjà habileté·es qui pourront utiliser le mot « diagnostic » pour désigner leurs conclusions cliniques lors de l’évaluation des troubles mentaux sont :
- les conseillers d’orientation habilités;
- les infirmières habilitées (à l’exception de la déficience intellectuelle);
- les sexologues habilités pour les troubles sexuels.
Par ailleurs, les professionnels suivants pourront aussi utiliser le mot « diagnostic » dans le cadre de leur évaluation :
- les conseillers d’orientation pour la déficience intellectuelle;
- les orthophonistes pour des troubles du langage ou des troubles d’apprentissage en lien avec le langage.
Actions et préoccupations de l’Ordre
Bien que les T.S. et T.C.F. ne sont pas habilités par le Code des professions à évaluer les troubles mentaux », l’Ordre a eu l’occasion de se prononcer sur le sujet à différents moments notamment en 2020 lors du dépôt du projet de loi 43, Loi modifiant la Loi sur les infirmières et les infirmiers et d’autres dispositions afin de favoriser l’accès aux services de santé.
Au fil des différentes consultations menées par le gouvernement, l’Ordre a indiqué ne pas être contre la possibilité pour certain·es professionnel·les de diagnostiquer certains troubles, dans la mesure où ces professionnel·les sont actuellement tenu·es d’utiliser le terme « évaluation » pour décrire leur démarche clinique alors que celle‐ci pourtant s’inscrit dans une visée de poser un diagnostic. Cela dit, l’Ordre a également fait part aux décideurs des préoccupations suivantes :
- le fait que l’obtention d’un diagnostic soit le critère premier ou principal d’accès à plusieurs programmes-services ;
- le fait que d’accorder à un plus grand nombre de professionnels le droit de poser des diagnostics ne garantit pas à la population un accès plus grand à des services en santé mentale ou à des traitements appropriés ;
- le fait que le recours aux diagnostics soit devenu le principal sinon le seul moyen pour obtenir des services de santé mentale, voire des services sociaux ;
- le fait que les professionnel·les qui seraient habilité·es à diagnostiquer œuvrent essentiellement au privé et que cela pose un enjeu d’accessibilité et d’universalité.
Au cours des consultations, l’Ordre a aussi rappelé qu’aux yeux des professionnel·les œuvrant en santé mentale, le diagnostic n’est pas l’essence du problème. Ce dernier réside plutôt dans l’accès aux soins et aux services en santé mentale dans le système public. Dans cet esprit, l’Ordre a plaidé pour le renforcement des services généraux publics de première ligne.