Le réseau de la santé et des services sociaux subi des bouleversements majeurs et chaque trimestre amène son lot de surprises et de déceptions. L’omniprésence du ministre à tous les niveaux de gestion, l’influence marquée des modèles de gestion issus de l’entreprise privée et s’inscrivant dans la nouvelle gestion des administrateurs du réseau, la création de mégastructures qui éloignent les services de proximité et l’hospitalo-centrisme peuvent causer la technocratisation, la démotivation, la déshumanisation et l’épuisement professionnel. Nous, travailleurs sociaux, avons à notre disposition des connaissances théoriques pour affirmer notre identité professionnelle, favoriser et clarifier notre pouvoir d’agir et ainsi mieux vivre cette difficile réforme.
L’approche structurelle permet d’indiquer la portion de deuil que nous avons à faire entre les besoins observés au quotidien, les possibilités et les limites du réseau.
Tout comme l’approche structurelle, l’approche préventive nous indique la portion de deuil que nous avons à faire entre la réalité et ce que nous aurions visé dans un monde idéal. La prévention primaire vise à faire en sorte que le problème ne se produise pas. La prévention secondaire vise à enrayer ou à modifier un problème. La prévention tertiaire vise à retarder ou arrêter la progression d’un problème. Nous devons savoir que nous intervenons principalement en prévention tertiaire, être réalistes et tenir compte des limites de nos interventions.
L’approche orientée vers les solutions reconnaît nos forces et se concentre sur notre potentiel plutôt que sur nos faiblesses. Elle nous donne l’occasion de porter notre attention sur ce qui fonctionne et non pas sur ce qui ne fonctionne pas.
L’approche de conscientisation permet de passer de la conscience non critique, (illusion d’un pouvoir réel) et de la conscience révoltée (ressentiment), à la conscience critique, c’est à dire ma part de responsabilité et celle du réseau de la santé.
L’empowerment met l’emphase sur l’exercice du pouvoir que nous détenons, sur nos forces, nos droits et nos habiletés et nous rappelle que nous sommes des agents de changement pour nous même.
L’approche communautaire indique l’importance du partage de la responsabilité du soutien au maintien de l’équilibre. Seule la résilience de croissance nous rend capable de soutenir à notre tour. Pour y arriver, nous utilisons l’ensemble de nos capacités de survie développées à partir de réflexes de survie (ressources internes) et la force du soutien de notre entourage (ressources externes). Nous croyons que le soutien de nos collègues, nos coordonnateurs, nos superviseurs et de nos gestionnaires est essentiel. Nous croyons aussi que nous devons faire appel à de la supervision privée s’il y a absence de soutien au sein de l’organisation.
Le modèle PNL (programmation neurolinguistique) aide à se positionner face à un réseau en bouleversement en développant une meilleure conscience de soi, de l’autre et de l’ensemble. La première position est celle de la conscience du moi, de ma place, de mon propre vécu, la deuxième position est celle de la conscience de l’autre, de nos clients et de leurs besoins, la troisième position est celle de la conscience systémique, du recul, de l’analyse de l’ensemble des données recueillies et la quatrième position est celle de la conscience éthique, du recul accentué, du partage de la responsabilité du changement en fonction du rôle et des capacités de chacun. Nous trouvons l’équilibre dans l’exploration des quatre positions.
L’approche systémique nous donne l’occasion de réfléchir à la place que nous occupons dans le système et détermine notre statut par rapport à celui-ci. Nous pouvons, entre autres, éviter le piège de la triangulation. Nos clients étant les victimes, le réseau de la santé le persécuteur et nous, travailleurs sociaux, les sauveurs.
Enfin, L’approche interdisciplinaire nous rappelle l’importance de l’investissement de chaque profession sur son propre chemin identitaire. Cet investissement permet de préciser les ressemblances et les particularités entre professionnels.
Nous croyons qu’une identité professionnelle forte et des assises théoriques solides aident à mieux vivre cette difficile réforme et aident aussi à diminuer la technocratisation, la démotivation, la déshumanisation et l’épuisement professionnel. La formation continue, qu’elle soit à l’interne ou en externe, s’avère ainsi importante voire essentielle au maintien de notre équilibre et à la poursuite de notre engagement à faire une différence dans la vie de nos clients.